La frontière à Rosso : racket à tous les étages

On savait bien qu’il ne fallait pas passer à Rosso ; tous les forums nous le disaient mais les aléas de la route nous ont contraint à passer par là. La journée s’annonçait pourtant parfaite et sportive avec de la piste et de la route méchamment défoncée. Ça s’est fini en stress à la frontière.

Lever à 8:00, on cherche quelque chose pour le petit déjeuner sans succès (trop tôt pour ça à Nouakchott). On fait les bagages et on charge les motos. On trouve une pompe à essence après quelques centaines de mètres. On fait le plein, tout va bien.

Il nous faut rejoindre la N2 qui file vers le sud et on traverse Nouakchott au GPS dans les faubourgs. Beaucoup de sable, un peu de goudron parfois. On est dans une vraie ville africaine ; ça grouille de partout malgré l’heure matinale.



On rejoint enfin la N2 qui ressemble en fait à une piste dans la ville. Elle est complètement défoncée et le goudron disparait totalement sur des kilomètres.



A la sortie de Nouakchott, ça va mieux et on roule sensiblement plus vite. On est rapidement rappelé à l’ordre car Pierrick qui est devant fait un saut violent, Benoit qui roulait vite derrière parvient à corriger la trajectoire et éviter le nid d’autruche (il n’y a pas de nids de poules là-bas ; les plus petits font un mètre de diamètre et très souvent, la route est emportée sur toute la largeur sur plusieurs mètres). Avec les motos, on s’en sort bien mieux que les 4x4 et autres camions. On double tout le monde, parfois en passant sur les bordures qui sont faites de sable mou mais sur un substrat plus rigide. On glisse deux ou trois fois mais pas de chute à déplorer.


Plus loin, on tombe sur une zone de travaux de 15 km qui nous oblige à passer sur le sable sur toute la longueur. On essaie de rouler vite mais on est rappelés à l’ordre ; Il y a des passages de sable mou sur d’importantes épaisseurs. On ralentit et quelques 4x4 nous doublent à nouveau.



A la fin de la zone de travaux, on retrouve la route défoncée mais maintenant on a la technique ; on roule debout pour anticiper et on passe entre les ornières. Quand la route est trop défoncée on roule sur le coté droit, dans le sable.






On traverse une petite ville dans laquelle on espère trouver de l’essence pour être sûrs d’aller jusqu’à Diama avec la BMW mais on n’en trouve pas. Uniquement du gazole encore une fois ! Ce n’est pas très grave, Diama n’est plus qu’à 200 km et avec le bidon de 5 litres additionnel ça devrait passer.


La route est entrecoupée de nombreux contrôles de police où l’on fournit des fiches d’identification. Un policier nous précise, quand on lui dit qu’on veut passer à Diama qu’un camion s’est renversé avant l’arrivée au barrage et que la piste est totalement coupée. On trouve ça louche mais pourquoi pas, c’est peut-être vrai.

On continue jusqu’à l’embranchement de Diama, environ 42 km au nord de Rosso et là, une personne en scooter vient à notre rencontre et nous demande de nous arrêter. Il prétend qu’il travaille avec un certain BBR qui est un facilitateur à Diama qu’on a contacté la veille au téléphone suite aux conseils d’une personne rencontrée dans notre hôtel à Nouakchott. Il devait nous faciliter le passage à Diama.

Le gars, qui se nomme Ahmedi, nous explique que BBR l’a appelé pour signaler que la voie vers Diama était bloquée suite à un accident de Camion et il nous passe BBR qui nous demande de faire confiance à Ahmedi qui va nous faire passer par Rosso. Pierrick doute de l’information sachant que tous les forums disent de ne pas passer par Rosso pour cause de corruption exacerbée et propose de tenter quand même de passer par Diama ou d’aller à Rosso mais sans Ahmedi. Ce dernier propose de nous accompagner et de nous faire sortir de Mauritanie pour 10 euros par personne. C’est très louche car le trajet aller / retour coûtera déjà dans les 20 euros en essence. Ça nous coûtera probablement sensiblement plus cher. Mais après discussion avec Benoit, on accepte la proposition et nous voilà partis pour Rosso en suivant Ahmedi et un de ses collègues sur un scooter Tmax 500.

On roule vite car la route est maintenant parfaite, de l’embranchement jusqu’à Rosso. Arrivés à Rosso, Ahmedi nous fait entrer dans l’enceinte du bac qui nous permettra de traverser le fleuve Sénégal. Et les discussions commencent. Rien que pour sortir de Mauritanie, il faudra payer pour chacun :
  • Un ticket d’accès à l’enceinte du bac
  • Le passage sur le bac
  • Des frais de tampon de sortie de Mauritanie (Pierrick s’insurge contre ça mais rien n’y fait. Ils vont chercher un douanier qui confirme le prix et nous fait même un reçu). Pour sortir de Mauritanie avec un véhicule, il faut payer ! C’est 60 euros par personne.
  • L’assurance pour un mois au Sénégal. Ils prétendent qu’on doit la payer en Mauritanie car on n’est pas autorisés à monter sur le bac sans ça. Ils demandent 75 euros par moto pour un mois d’assurance.
Pierrick les traite de voleurs et d’escrocs et on est parti dans des discussions longues et stressantes qui finissent inévitablement par des « les français sont des colons, ils ont pillé nos pays », « On vous laisse rentrer chez nous mais il est impossible de rentrer chez vous », « pour vous 150 euros ce n’est rien », etc. C’est très tendu mais ils ne lâchent rien et ils sont nombreux à tenter de nous convaincre que c’est le prix. Ils nous emmènent voir les douaniers et les policiers qui sont de mèche et qui confirment les montants. C’est de la corruption très bien organisée. Ahmedi nous avouera à la fin qu’il vit de ça, que c’est son boulot.

On paye donc 2500 Ouiguiyas + 120 euros pour le tampon sur les passeports, l’accès à l’enceinte et le passage sur le bac. On cède également en donnant 150 euros pour les assurances et on embarque finalement. On est sortis de Mauritanie et il nous reste à entrer au Sénégal.

Ahmedi nous accompagne au Sénégal et nous fait passer devant tout le monde. On donne les carnets ATA avec le feuillet des espagnols et il revient après 10 mn avec les carnets dûment tamponnés. On passe au tamponnage des passeports avec relevé des empreintes et photo. C’est rapide. Mais pour tous ça on devra encore payer 240 euros (120 chacun) pour obtenir les passavants qui nous permettent de circuler au Sénégal avec les motos.

Ils nous font sortir de l’enceinte de la douane et ouvrent pour cela la porte rien que pour nous et on règle la commission d’Ahmedi (10 euros chacun pour la Mauritanie et 10 euros chacun pour le Sénégal).

On doit reconnaitre que le passage au Sénégal a été rapide (environ ½ heure en tout) et que sans facilitateur ça n’aurait pas été possible. La sortie de Mauritanie quant à elle a pris plus de deux heures et on se demande si on n’aurait pas obtenu le même résultat par nous-mêmes.

En faisant le bilan, on s’en tire pour 320 euros chacun pour sortir de Mauritanie et entrer au Sénégal.

C’est énorme et on vous déconseille vivement de faire appel à un facilitateur. Si on vous propose de passer par BBR (what's app +221 779006830) fuyez.

Mieux vaut probablement faire les démarches par vous-même si vous ne voulez pas payer. Ça prendra peut-être sensiblement plus de temps toutefois. On a lu sur les forums qu’on pouvait passer cette frontière pour environ 100 euros par véhicule. On aura payé trois fois ça. Il est vrai qu’on a des carnets ATA et qu’il faut donc un papier de plus.

Le mieux est certainement de ne pas passer à Rosso. Si vous pouvez, passez par Diama.

On croyait en avoir terminé et on avait la désagréable impression de s’être bien fait arnaquer et d'avoir encouragé la corruption en cédant quand, au premier rond-point au Sénégal, après avoir fait seulement 5 km, un homme apparemment des douanes nous fait signe de nous arrêter et de nous garer derrière des poids-lourds. On s’arrête et on présente nos passeports et nos très chers passavants. Il prend l’ensemble, s’éloigne un peu puis revient pour nous expliquer qu’on va procéder à la pesée des motos ! Et que ça va coûter 15000 CFA par moto (23 euros). On s’insurge et on lui dit qu’il est stupide de peser des motos, qu’on n’a pas de cargaison. Pendant que Pierrick discute avec le « douanier » Benoit en profite pour discuter avec les conducteurs de camions arrêtés en attente de pesée et ils précisent que ça ne concerne que les camions et que c’est gratuit.

Le « douanier » nous rend nos passeports avec les passavants et attends ces 30000 CFA. Quand Benoit revient, il dit « on ne paye pas et on s’en va ! ». Le « douanier », irrité, précise qu’on va se faire arrêter tout de suite et qu’on paiera une amende de 60000 CFA pour le délit de fuite mais Benoit enfourche sa moto et démarre. Pierrick attend un peu pour voir s’il se fait arrêter et le suit. Le "douanier" est médusé. Ouf ! On est passés.

On roule vers Saint Louis sur environ 70 km sans arrêt car on veut éviter de rouler de nuit. On est bien inspirés car on trouve des ânes, des chèvres des phacochères et des enfants sur la route. La route est belle et inciterait à rouler vite mais on reste prudents. On arrive tout de même de nuit à Saint Louis où l’on prend une chambre dans l’hôtel mythique de la ville : « l’hôtel de la poste ». Celui où descendaient des héros de l’aéropostale ». Notre chambre jouxte celle de Mermoz ! Pas de chance, il n'est pas là ce soir !


Commentaires

  1. Des nids d'Autruche hein? Ouais vaut mieux éviter de rouler de nuit dès fois qu' il y en ait une à couver. Pov' bêtes, il n'y en a plus guère par là bas. Quand à la corruption, il faut prendre ça comme une coutume locale et rester cool. Quand tu as des milliardaires qui viennent dans ton jardin, t'essaies de prendre quelques miettes quoi, c'est normal. Pensez à la famille d'Ahmedi qui va pouvoir faire bombance grâce à vous. Double ration de riz, merci la France.

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  2. Ca parait un peu risqué la traversée de la Mauritanie (et un peu cher). Belles photos, Merci !

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